otre thèse aborde la conjonction entre trois thématiques que les recherches et les acteurs de terrain
excluent souvent mutuellement : les jeunes, le milieu rural, les pratiques culturelles et de loisir. Notre
problématique est de comprendre comment les pratiques culturelles des jeunes ruraux d'une part, et la
recomposition des territoires ruraux au Sud du Brésil d'autre part, s'infuencent réciproquement. Les premières
sont entendues comme la partie culturelle des pratiques développées par les jeunes durant leur temps libre et la
seconde recouvre l'ensemble des éléments permettant d'évoquer une ressignifcation et une requalifcation
profonde des territoires ruraux. Trois hypothèses sont testées : 1/ les pratiques culturelles sont mobilisées dans
les expériences des jeunes ruraux comme une réponse à une crise multifactorielle des milieux ruraux ; 2/ chaque
confguration spatiale et profl territorial infue sur les représentations, les moyens et les formes d'action des
jeunes ; 3/ les territoires ruraux sud-brésiliens connaissent un processus de recomposition, dans lequel les rôles
socio-économiques, culturels, politiques et symboliques des territoires ruraux sont modifés par les usages de la
jeunesse, en particulier par leurs pratiques culturelles.
Leur migration vers les villes étant une préoccupation constante des acteurs locaux et des observateurs,
les jeunes de 18 à 28 ans, qui sont restés ou allés vivre en milieu rural, sont l'objet principal de ce travail. La
façon dont ces jeunes mettent en place et mobilisent leurs pratiques culturelles avec les contraintes imposées par
les territoires ruraux sud-brésiliens choisis (manque d'infrastructures culturelles, diffcultés pour la mobilité,
pressions sociales, confits de génération, problématique du genre), permet de comprendre comment elles
infuencent et sont infuencées par les recompositions en cours sur ces mêmes territoires. Le Sud du Brésil
possède une agriculture familiale forte, ainsi l'image et les fonctions attribuées aux espaces ruraux y ont
rapidement évolué au cours des dernières décennies. Dans le même temps, si les pays développés misent sur la
culture pour redéfnir leurs capitales et anciens bassins industriels, le rôle de la culture dans les espaces ruraux et
agricoles, a fortiori ceux des pays émergents, est négligé. Pourtant, ces derniers se trouvent actuellement devant
des choix de société incluant une recomposition des territoires ruraux, que les jeunes rencontrés envisagent
comme des espaces de possible.
Ce travail de géographie utilise principalement des méthodes de géographie sociale rurale (entretiens,
cartographie des données) liées à celles de la sociologie qualitative (récits de vie, observation participante). D'un
point de vue du terrain, la démarche comparative permet d'aborder la question de l'infuence de certaines
caractéristiques du territoire sur notre problématique, avec trois terrains différents, bien que tous situés dans la
région Sud du Brésil (Rio Grande do Sul et Santa Catarina). La diversité ainsi que l'unité de problématique qui
traverse ces trois territoires permet d'élaborer une typologie reliant les échelles d'appartenances des jeunes et la
façon dont ils mobilisent les pratiques culturelles pour les alimenter. Ils ont tous dans leurs parcours de vie été
confrontés au départ en ville, mais sont là et s'investissent dans la vie sociale de leurs communautés car elle est
la raison de leur choix. Les pratiques culturelles qu'ils développent (théâtre, musique, danse, bals activités
traditionnelles, telles que rodéos ou olympiades rurales), leur permettent de s'identifer à une ruralité toujours
recomposée, recréée parfois, réinventée souvent. Les actions des mouvements sociaux, des politiques publiques,
du secteur privé ou des associations dans ce domaine ont pour objectif de mobiliser les jeunes à des fns
diverses. Les jeunes, quant à eux, souhaitent simplement mettre en place des alternatives pour s'approprier leurs
lieux de vie ruraux.